Sous-traitance et responsabilité de l'entreprise principale
Deux principes sous-tendent les relations en matière de sous-traitance :
– Seule l'entreprise principale est soumise à l'obligation d'assurance en responsabilité civile décennale. Le sous-traitant n'est lui pas soumis à cette obligation car il n'est pas en relation directe avec le maître d'ouvrage.
– Cependant, la responsabilité contractuelle ou délictuelle du sous-traitant peut quand même être recherchée en cas de dommages, car il a une obligation de résultat envers l’entreprise principale, ce qui fait peser sur lui les mêmes responsabilités. Il doit donc être assuré.
/. Responsabilité de l’entreprise principale
L’entreprise principale demeure entièrement responsable vis-à-vis du maître d’ouvrage de la bonne et complète exécution des travaux sous-traités. En effet, c’est l’entrepreneur principal qui est titulaire du marché et qui est donc l’unique interlocuteur du maître d’ouvrage.
En cette qualité, l’entreprise principale devra toujours répondre juridiquement devant son client, maître d'ouvrage, des désordres, carences et malfaçons imputables techniquement à son sous-traitant.
Il s'agit d'une jurisprudence constante : 3ème Civ, 12 juin 2013, n° 11-12283 ; Cassation civile 3e, 25 juin 2020, n° 19-15929, ...
L’entrepreneur principal ne peut donc se prévaloir de la faute du sous-traitant envers le maître d’ouvrage.
//. Dans l’hypothèse de désordres affectant la construction faisant l’objet d’une déclaration de sinistre par le maître d’ouvrage dans le cadre de la garantie décennale, qui est responsable ?
Le sous-traitant n’est pas assujetti à la responsabilité civile décennale, c’est-à-dire qu’il n’est pas présumé responsable en cas de désordres graves compromettant la solidité d’un ouvrage ou le rendant impropre à destination. Comme déterminé précédemment, seul l’entrepreneur principal est présumé responsable de son sous-traitant vis-à-vis du maître d’ouvrage.
Dès lors, QUELLES PRÉCAUTIONS PRENDRE EN CAS DE SOUS-TRAITANCE pour une entreprise principale ?
Lors de la passation d’un marché, il est impératif d’exiger du sous-traitant pressenti la production de ses attestations d’assurance couvrant sa responsabilité en cours de chantier, ainsi que si possible sa responsabilité décennale s’il a contracté cette dernière. La validité de l’attestation au moment de l’ouverture du chantier devra être scrupuleusement vérifiée, tout comme les activités y figurant, lesquelles devront correspondre à la nature des prestations sous-traitées. Signalons que des exclusions de garantie pour les travaux exécutés en sous-traitance peuvent figurer dans certaines polices. Aussi n’est-il pas superflu de contacter directement un assureur pour connaître la portée réelle d’une clause d’exclusion.
Il est également important de rédiger un contrat de sous-traitance précis et de bien délimiter les prestations confiées au sous-traitant.
En cours de travaux, déléguer ne signifie pas se désintéresser. Si le sous-traitant est assujetti à une obligation de résultat, un devoir de surveillance incombe néanmoins à l’entreprise principale qui ne devra pas hésiter à mettre le sous-traitant en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception s’il décèle un manquement aux règles de l’art. Ce procédé, jugé parfois excessif par les professionnels demeure pourtant le seul moyen de démontrer qu’une surveillance active a été exercée sur le sous-traitant. N’oubliez jamais que le droit de la preuve privilégie l’écrit par rapport à toutes sortes de témoignages difficilement vérifiables !
Si un sinistre devait se déclarer, l’assureur de l’entreprise générale demandera le contrat de sous-traitance pour vérifier les prestations exécutées par son sous-traitant. Plus le contrat de sous-traitance est complet (sur les prestations réalisées), plus la gestion du sinistre s’en trouve facilitée pour mettre en cause ensuite le sous-traitant qui a une obligation de résultat et qui devra assumer ses éventuels manquements contractuels. N’hésitez pas à contacter votre CAPEB, nous disposons de contrats-types au format PDF modifiable.
Les attestations d’assurance devront être conservées aussi longtemps que possible après la fin du chantier. Elles permettront, en cas de disparition du sous-traitant, de solliciter l’intervention de son assureur ou de le convoquer pour des opérations d’expertise qui lui seront opposables. Mais quelles que soient les dispositions adoptées pour pallier la défaillance d’un sous-traitant, l’entrepreneur principal se heurtera toujours au principe qui veut que l’assureur du sous-traitant soit en droit d’opposer le montant de la franchise prévue par le contrat de son assuré.
///. L’action contre le sous-traitant
L’entrepreneur principal doit certes assumer cette lourde responsabilité, mais si sa responsabilité est engagée à la suite d’une faute commise par un sous-traitant il peut ensuite agir contre ce dernier.
Sur le fondement contractuel, le sous-traitant est redevable, vis-à-vis de l'entreprise principale, des obligations pour lesquelles il s’est engagé. Sa responsabilité peut quand même être engagée en cas de dommages à l’ouvrage après réception ou en cas de dommages causés à des tiers (hors ouvrage).
Prudence donc, bordez bien le document de base qu’est le contrat de sous-traitance, exigez de vos sous-traitants ses attestations d’assurance, et il est recommandé de conditionner la conclusion d’un contrat de sous-traitance à la souscription, par chacun des sous-traitants, d’une assurance décennale.