Présumer un salarié démissionnaire : le décret d'application est paru !
Cependant, la « loi sur le marché du travail » (« portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail ») a institué un dispositif permettant de présumer un salarié démissionnaire. Elle a été validée le 15 décembre 2022 par le Conseil constitutionnel, et publiée au Journal officiel le 22 décembre.
Pour devenir opérationnelle, il ne manquait plus que la publication d’un décret d’application. C’est à présent chose faite depuis le 19 avril 2023 : vous pouvez désormais assimiler l’abandon de poste de votre salarié à une démission, à condition toutefois que certaines conditions soient respectées.
1. Jusqu'à présent …
Jusqu'alors, un salarié n'était pas enclin à démissionner, car il ne bénéficiait alors pas dans ce cas (sauf en quelques exceptions clairement définies) des droits l'assurance-chômage.
D'un autre côté, de nombreux employeurs refusant une rupture conventionnelle pour ne pas avoir à payer à ce salarié une indemnité de fin de contrat.
S'il ne souhaitait pas faire obstacle au départ du salarié, l'employeur pouvait tacitement convenir avec son salarié que celui-ci ne se présente plus à son poste de travail, sans plus donner de ses nouvelles.
Une procédure de rupture de contrat était alors engagée à l'initiative de l'employeur concerné, procédure qui aboutissait au licenciement du salarié absent pour faute grave -donc sans versement d'une indemnité.
À la suite, le salarié licencié pour abandon de poste bénéficiait des droits à l'assurance-chômage.
2. À présent…
Une des finalités de cette « loi sur le marché du travail » consiste à priver les salariés abandonnant leur poste de travail du droit à l'assurance chômage.
- Une mise en œuvre sous conditions :
Pour valablement présumer votre salarié démissionnaire, vous devez constater que celui-ci :
- abandonne volontairement et sans justification son poste de travail ;
-ne reprend pas son poste après l’avoir mis en demeure dans un délai minimum de 15 jours pour se justifier, décompté en jours calendaires à compter de la date présumée de première présentation de la mise en demeure.
Mon conseil : Comptez 3 semaines pour être large.
- Le contenu de la mise en demeure :
Cette mise en demeure, adressée par lettre recommandée LRAR, doit par conséquent :- enjoindre au salarié de justifier son absence;
- l’enjoindre de reprendre son poste;
- préciser au salariéles conséquences de son inaction à l’issue du délai imparti : rupture du contrat de travail du fait de la démission présumée, absence d’allocations chômage;
- préciser que le salarié qui ne reprendrait pas son poste au plus tard à la date fixée est redevable d’un préavis, et ainsi qu’il prévoie l’organisation de l’exécution de ce préavis.
L’employeur peut également rappeler que le silence du salarié sur l’organisation de l’éventuel préavis peut constituer de la part du salarié une manifestation de son refus d’exécuter le préavis.
(Un préavis de démission est dû si des dispositions législatives ou conventionnelles le prévoient. A défaut aucun préavis n’est dû).
- Les effets de la mise en demeure :
- Comme pour la convocation à l’entretien préalable au licenciement, l’envoi de la mise en demeure par lettre recommandée permet de prévenir toute contestation sur la date de remise de la mise en demeure.
- Si le salarié refuse de prendre connaissance de la mise en demeure, cette dernière est quand même notifiée régulièrement dès lors qu’elle a bien été présentée au domicile du salarié. Il en va de même si le salarié, par négligence, n’a pas fourni à son employeur la bonne adresse de son domicile.
- Si le salarié répond à la mise en demeure de son employeur en justifiant son absence à son poste de travail par un motif légitime, la procédure permettant de présumer d’une démission ne doit pas être conduite à son terme.
- Si le salarié ne répond pas à la mise en demeure et ne reprend pas le travail au plus tard à la date fixée par l’employeur, il sera présumé démissionnaire. La démission du salarié sera constatée à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur.
- Si le salarié répond à la mise en demeure de son employeur qu’il ne reprendra pas son travail dans l’entreprise, il sera également considéré comme démissionnaire à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur.