LES IDEES RECUES SUR LA DEMISSION
La démission est la volonté claire et non équivoque du salarié de quitter son travail. Elle doit être clairement exprimée par la personne démissionnaire pour mettre fin au contrat de travail. Bien qu’elle soit un droit reconnu aux salariés, la démission est souvent entourée d’idées préconçues et de stéréotypes pouvant influencer la perception collective de cet acte.
Nous vous proposons de faire le point sur ce mode de rupture du contrat de travail.
1) Un salarié en CDD peut démissionner !
Faux. La démission est un mode de rupture à destination des salariés en CDI. A l’issue de sa période d’essai, le salarié en CDD peut rompre son contrat dans les cas suivants :
- Accord commun des parties ;
- Embauche du salarié en CDI ;
- Faute grave ou lourde ;
- Force majeure ;
- Inaptitude.
2) Il faut nécessairement qu’une démission soit présentée par écrit !
Faux. A la différence du licenciement, la démission n’est soumise à aucun formalisme. De cette manière, un salarié peut tout à fait démissionner verbalement. Pour autant, pour une question de preuve, il est coutumier d’adresser un écrit à l’employeur. Ce dernier doit être clair et non équivoque sur la volonté du salarié de quitter l’entreprise par la voie de la démission.
3) « Pas besoin d’exécuter un préavis si je démissionne »
Faux. Le principe est le suivant : un salarié démissionnaire doit respecter un préavis. La durée de ce préavis est fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise et figure dans sa Convention collective. Cependant, le salarié peut demander à son employeur une dispense de préavis. L’employeur peut librement accepter ou refuser cette proposition.
4) L’employeur peut refuser la démission de son salarié !
Faux. Un employeur ne peut pas refuser la démission de l’un de ses salariés du moment que cette dernière est librement consentie par le salarié. Si un salarié souhaite quitter l’entreprise par le biais d’une démission, son employeur ne peut pas s’y opposer. C’est un droit dont bénéficie chaque salarié en CDI.
Un salarié a le droit de démissionner à tout moment sans que le contrat ne puisse exclure cette possibilité.
5) Un salarié ayant présenté sa démission, ne peut pas se rétracter !
Faux. Il existe deux cas de figure pour lesquels un salarié peut se rétracter :
- Premier cas : la démission est équivoque et ambiguë : il est recommandé à l’employeur d’accepter la rétractation du salarié afin d’éviter toute contestation ultérieure portant sur la validité de la démission.
C’est notamment le cas lorsque la démission a été donnée :
o Sous l’emprise de la colère ;
o En raison des faits reprochés à l’employeur ;
o Sous l’emprise de troubles psychiques ;
o Sous la contrainte ;
o Etc…
- Second cas : la démission est claire et non équivoque : dans ce cas, si le salarié souhaite revenir sur sa démission, l’employeur dispose de la faculté d’accepter ou de refuser le retour du salarié dans l’entreprise.
6) La démission doit nécessairement être motivée !
Faux. Le salarié n’a pas besoin de motiver sa démission pour que cette dernière soit considérée comme recevable. Il suffit qu’elle soit claire et non équivoque.
7) « Mon salarié démissionne, je ne lui dois rien »
Faux. En principe, certes, dans le cadre d’une démission, le salarié ne bénéficiera pas d’une indemnité de licenciement. En revanche, l’employeur reste tenu de lui verser les indemnités qui lui sont effectivement dues, soit :
□ L’indemnité compensatrice de congés payés acquis et non pris ;
□ L’indemnité compensatrice de préavis si le salarié devait l’effectuer mais que l’employeur l’en a dispensé ;
□ Le bénéfice de la contrepartie de l’application d’une clause de non-concurrence non renoncée.
La démission n’étant pas une perte involontaire d’emploi, le salarié ne pourra pas bénéficier des droits aux allocations de chômage.
8) « Si je choisis de démissionner, je ne peux plus opter pour un autre mode de rupture par la suite »
Faux. Il est tout à fait possible pour un salarié ayant démissionné de conclure une rupture conventionnelle ultérieurement, si l’employeur y consent.
La Cour de cassation a jugé que : « lorsque le contrat de travail a été rompu par l’exercice par l’une ou l’autre des parties de son droit de résiliation unilatérale, la signature postérieure d’une rupture conventionnelle vaut renonciation commune à la rupture précédemment intervenue ».
Autrement dit, l’employeur et le salarié ont la possibilité de renoncer à la rupture du contrat, pourtant déjà intervenue par le biais d’une démission, pour conclure une rupture conventionnelle.
Cependant, il faut que le processus de signature soit mené à son terme, sinon quoi, on considérera que le salarié n’a pas renoncé à démissionner.
9) Un salarié en arrêt maladie ne peut pas démissionner !
Faux. Du moment que la démission est claire et non équivoque, un salarié peut démissionner à tout moment, peu important qu’il soit en arrêt maladie.
Pour autant, un salarié démissionnaire reste tenu d’effectuer son préavis. Quid de ce préavis durant un arrêt maladie ?
Il faut distinguer plusieurs hypothèses :
□ Hypothèse 1 : le salarié est en arrêt de travail au moment où il dépose sa démission ET l’arrêt de travail s’achève avant le terme du contrat : le salarié doit retourner travailler jusqu’à la fin de son préavis ;
□ Hypothèse 2 : le salarié est en arrêt de travail au moment où il dépose sa démission ET l’arrêt de travail se termine après la période de préavis : le préavis n’est pas prolongé et le contrat est rompu à la fin de ce préavis ;
□ Hypothèse 3 : le salarié est en arrêt maladie au cours du préavis et son origine est non professionnelle : le préavis n’est pas prolongé ni interrompu. Le contrat est rompu à la fin du préavis, peu important que le salarié soit encore en arrêt ;
□ Hypothèse 4 : le salarié est en arrêt maladie au cours du préavis et son origine est professionnelle : le préavis est suspendu pendant l’intégralité de l’arrêt maladie. Lorsque ce dernier cesse, le préavis est prolongé d’une durée équivalente à celle de l’arrêt de travail.
10) Un abandon de poste et une démission sont des dispositifs drastiquement opposés !
Faux. Depuis le 19 avril 2023, il existe une présomption de démission en cas d’abandon de poste volontaire d’un salarié. A défaut d’apporter un justificatif légitime, tout salarié ne se présentant pas à son poste de travail, malgré l’envoi d’une mise en demeure de reprendre le travail, sera assimilé à un démissionnaire en raison d’un abandon de poste.
Le régime de l’abandon de poste est calqué sur celui de la démission. De cette manière, un salarié ayant abandonné son poste sera privé des allocations de chômage.
SOURCES :
□ Articles L.1243-1 et suivants du Code du travail sur la rupture anticipée du CDD ;
□ Article L.1234-5 du Code du travail sur la dispense de préavis ;
□ Article L.1237-1 du Code du travail sur l’existence d’un préavis en cas de démission ;
□ Article L.1237-1-1 du Code du travail sur la présomption de démission en cas d’abandon de poste ;
□ Article R.1237-13 du Code du travail sur la présomption de démission en cas d’abandon de poste ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 09/05/2007 (05-40.315) sur la volonté claire et non équivoque de la
démission ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 21/09/2005 (03-43.937) sur l’aspect définitif de la démission ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 03/03/2015 (13-20.549) sur la rupture conventionnelle et la
démission ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 16/09/2015 (14-10.291) sur la non concrétisation de la rupture
conventionnelle après une démission ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 28/06/1989 (86-42.931) sur le préavis durant un arrêt maladie ;
□ Arrêt de la Chambre sociale du 18/06/1996 (93-43.581) sur la suspension du préavis durant un arrêt
maladie d’origine professionnelle ;
□ Décret n°2023-275 du 17/04/2023 sur la mise en œuvre de la présomption de démission en cas
d’abandon de poste volontaire du salarié.