Entre incertitude et crainte de charges nouvelles
Le maintien pour une période indéterminée de Gabriel Attal à Matignon à la tête d’un gouvernement démissionnaire traitant uniquement les affaires courantes et le manque de visibilité quant à l’orientation politique du prochain exécutif inquiètent l’ensemble des Français et notamment les chefs d’entreprises artisanales du bâtiment. “A quelle sauce serons-nous mangés ?” pourrait bien résumer le sentiment général !
Il faut dire que la situation économique du pays présente plusieurs indicateurs inquiétants. La Banque de France entrevoit une croissance bien maigre pour le second trimestre, à hauteur de 0,1 % du PIB seulement, tandis que l’Inspection Générale des Finances juge vraisemblable une croissance de 1 % sur l’ensemble de l’année 2024. Parallèlement, le déficit public a atteint 5,5 % du PIB en 2023 et rien ne permet de penser qu’il sera plus contenu cette année. La plupart des instituts s’accordent à dire qu’il faudrait réduire drastiquement la dette publique de la France dès l’an prochain, de 30 milliards pour certains, à l’instar de l’IFRAP, Think tank spécialisé dans les finances publiques, et même de 60 milliards selon l’institut Rexecode…
Nous sommes loin du compte, même si Bercy a relevé son objectif d’économies budgétaires à 25 milliards. Mais cet objectif, même insuffisant, sera-t-il atteignable ? Rien n’est moins sûr. Et tout dépend du Premier ministre qui sera désigné et de la majorité relative sur laquelle il pourra s’appuyer à l’Assemblée nationale.
Manifestement, si le nouvel exécutif était constitué par le Nouveau Front Populaire, les mesures annoncées dans son programme des élections législatives auraient pour conséquence, si elles étaient mises en œuvre, d’accroître le déficit et d’accentuer le risque de sanctions financières à l’égard de la France, que ce soit de la part des agences de notation, comme de la Commission européenne, qui attend de nous un déficit inférieur à 3 % du PIB, ou encore des marchés financiers.
La situation est donc source d’angoisse pour les entreprises, d’autant que le programme du NFP prévoit d’imposer un Smic à 1600 €, une hypothèse susceptible de peser sur le modèle économique de nombre d’entreprises et, par conséquent, sur leurs emplois, sachant que l’activité régresse dans notre secteur. La période d’attentisme dans laquelle nous nous trouvons est, en effet, propice aux reports et aux annulations de devis, aggravant de fait le recul de l’activité que les entreprises artisanales du bâtiment connaissent depuis le début de l’année. C’est d’ailleurs ce que le Président de la CAPEB a déclaré lors de ses récentes interviews dans la presse.
Le gouverneur de la Banque de France a d’ores et déjà annoncé qu’une telle hausse du Smic, conjuguée à la lourdeur des impôts sur les entreprises, serait un très mauvais coup porté à l’emploi. Un avis qui semble corroboré par une enquête menée en juin dernier auprès d’un millier de TPE et PME qui ont été 27 % à déclarer qu’elles seraient obligés de licencier si le Smic devait augmenter de 200 €. 50 % répercuteraient cette hausse dans leurs prix ce qui nuancerait l’intérêt de la mesure pour le pouvoir d’achat des salariés.
Enfin, 14 % des chefs d’entreprise interrogés pour cette enquête ont averti qu’ils seraient contraints de mettre un terme à leur activité si le Smic augmentait. Ils viendraient ainsi rejoindre la cohorte de défaillances d’entreprises qui s’est déjà accentuée au cours du printemps. La dernière étude d’Altares, publiée le 11 juillet, a confirmé à ce propos que le bâtiment faisait partie des secteurs les plus en difficultés, en particulier le gros œuvre (+ 38 % des défaillances) et surtout parmi les constructeurs de maisons individuelles ( + 54,8 %). Et même si le nombre de procédures est moindre pour les autres corps d’état, elles progressent fortement au 2ème trimestre pour les professionnels du bois (+ 60 %), de la plâtrerie (+ 50 %) et même pour les installateurs de climatisation (+ 87 %).
Qu’en sera-t-il demain ? Les tensions sociales qui commencent à apparaître ne sont guère rassurantes. Pendant ce temps, la CAPEB n’a de cesse, notamment par la voix de son Président dans les médias, d’alerter les pouvoirs publics sur la nécessité de reprendre au plus vite le cours des réformes engagées, en particulier celles visant à simplifier la vie des entreprises et leur accès au marché de la rénovation énergétique.