Dossier Inaptitude médicale d'un salarié (4/6) : L’obligation de recherche d’un reclassement du salarié inapte
Dans tous les autres cas, l’obligation de recherche d’un reclassement s’impose à l’employeur, et ce, quelles que soient les circonstances : salarié en période d’essai, en CDD, classé en invalidité 2e catégorie, salarié qui manifeste son refus de reprendre le travail.
Un manquement à l’obligation de recherche de reclassement peut coûter cher à l’employeur :
- si l’inaptitude est d’origine professionnelle (cf notre article précédent « inaptitude 2/6 ») : le licenciement sera jugé abusif. A défaut de réintégration du salarié dans l’entreprise, ce dernier percevra une indemnité au moins égale à 6 mois de salaire ;
- si l’inaptitude est d’origine non professionnelle (cf notre article précédent « inaptitude 2/6 ») : le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. A défaut de réintégration dans l’entreprise, le salarié percevra une indemnité d’un montant prévu par les barèmes Macron.
Le périmètre de la recherche de reclassement
L’employeur doit rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise.
Si elle appartient à un groupe formé par une entreprise dominante et des entreprises qu'elle contrôle, la recherche doit être menée au sein des entreprises du groupe auquel elle appartient situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
L’employeur ne peut à cet égard se contenter d’adresser un courrier type à l’ensemble des entreprises du groupe, sans y faire figurer d’indications relatives à l’ancienneté, au niveau et à la compétence du salarié, et respecter dans ce cas un délai de réponse.
Pour les entreprises ne comptant qu’un siège ou un établissement, ce dernier constitue le périmètre de recherche. Il n’y a plus d’obligation de recherche d’un reclassement externe à l’entreprise ou au groupe.
La recherche repose sur les emplois disponibles, y compris s’il s’agit de CDD. L’employeur n’est donc pas tenu de créer un nouveau poste pour reclasser le salarié déclaré inapte.
Les emplois proposés au salarié inapte doivent être appropriés à sa qualification et à son niveau de formation, au regard des conclusions écrites ou restrictions posées par le médecin du travail, et des indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L’employeur peut solliciter le médecin quant à ses propositions de reclassement ou mesures proposées telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
La proposition de reclassement
Les possibilités de reclassement doivent être proposées au salarié prioritairement à un recrutement externe.
Bien qu’il soit tenu à une obligation d’adaptation du salarié à son poste, l’employeur n’est pas tenu de dispenser au salarié une formation initiale qui lui fait défaut.
L’employeur peut tenir compte des souhaits du salarié dans le cadre de sa recherche de reclassement. Il n’est ainsi pas tenu de proposer au salarié inapte tous les postes disponibles compatibles avec son état de santé lorsqu’ils ne répondent pas aux souhaits formulés en amont par le salarié.
L’employeur n’a pas l’obligation de formuler des propositions de reclassement par écrit au salarié inapte, mais cela est recommandé pour disposer d’une preuve. La proposition de reclassement doit être précise et mentionner notamment les conditions d’emploi, la qualification du poste proposé, ainsi que la rémunération afférente et les horaires de travail applicables.
L’employeur doit accorder au salarié un délai raisonnable pour répondre à la proposition de reclassement qui lui est faite.
En cas d’acceptation d’une proposition de reclassement qui modifie le contrat de travail du salarié, l’employeur doit recueillir l’accord du salarié formalisé par la rédaction d’un avenant.
L’employeur n’a pas obligation de reclasser ou rompre le contrat du salarié inapte dans un délai d’un mois, il peut donc poursuivre la recherche de reclassement et/ou la procédure de rupture du contrat de travail du salarié inapte plus d’un mois après la déclaration d’inaptitude du salarié.
Dans ce cas, l’obligation mise à la charge de l’employeur est de reprendre le paiement du salaire un mois après le rendu de l’avis d’inaptitude médicale, et ce jusqu’au reclassement ou au licenciement effectif.
Le refus d’une proposition de reclassement par le salarié
En cas de refus d’une proposition de reclassement par un salarié inapte, l’employeur doit soit proposer d’autres possibilités de reclassement au salarié, soit engager une procédure de rupture de son contrat de travail en cas d’impossibilité de reclassement.
Son inaction pourrait en effet constituer un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié inapte aux torts de l’employeur. Et ce, même s’il a repris le versement du salaire à l’issue d’un délai d’un mois suivant le constat de l’inaptitude.
Les suites d’une impossibilité de reclassement
L’employeur qui se trouve dans l’impossibilité de proposer au salarié inapte des possibilités de reclassement doit lui en notifier les raisons par écrit.
Cette étape est un préalable obligatoire à l’engagement d’une procédure de rupture du contrat de travail du salarié inapte du fait de l’impossibilité de procéder à son reclassement.
A défaut, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. Ils ne se cumulent cependant pas avec l’indemnité due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou de licenciement abusif.
Cette formalité n’est toutefois pas obligatoire si l’employeur a proposé au salarié inapte une possibilité de reclassement conforme aux préconisations du médecin du travail qu’il a déclinée.
Le cas des salariés handicapés inaptes
De manière générale, l’employeur est tenu à une obligation d’adaptation du poste des travailleurs handicapés.
Il doit ainsi prendre les mesures appropriées pour leur permettre d’accéder, de conserver, d’exercer ou de progresser dans un emploi correspondant à leur qualification, ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. Et ce, en fonction des besoins dans une situation concrète. Le refus de prendre de telles mesures peut constituer une discrimination (C. trav., art. L. 5213-6).
Ces mesures ne sont toutefois prises que lorsque les charges consécutives à leur mise en oeuvre ne sont pas disproportionnées.
Ainsi, lorsqu’un salarié reconnu travailleur handicapé est déclaré inapte, l’employeur doit justifier de recherche d’aménagement de poste. A défaut de quoi, le licenciement qui en découle est discriminatoire et déclaré nul. Il peut pour cela prendre attache avec Cap emploi, en charge de la préparation, de l’accompagnement, du suivi durable et du maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap.
Lorsque l’inaptitude est d’origine professionnelle, l’employeur pourra par ailleurs bénéficier d’une aide de l’AGEFIPH pour transformer le poste de travail du salarié. Et en cas de licenciement, l’indemnité égale à l’indemnité compensatrice de préavis ne sera pas doublée du fait du handicap du salarié.