2024-05-06 00:00:00

Décryptage des offres «Luminaires à 0 €»

De nombreuses offres de rénovation des parcs d’éclairage extérieur sont proposées à des maîtres d’ouvrage professionnels en direct par des sociétés qui se proclament spécialistes en éclairage et financent jusqu’à 100% du montant des produits qu’elles distribuent.

Ces offres sont-elles légales ? Comment sont-elles construites ? Des contrôles sont-ils réalisés sur les chantiers réalisés ?

Un nombre croissant d’entreprises artisanales d’électricité sont confrontées à des offres de« luminaires gratuits » et s’interrogent sur la légalité de celles-ci. Afin de leur apporter une réponse, ci-dessous quelques éléments relatifs au fonctionnement de ces offres…

Le constat

De nombreuses offres de rénovation des parcs d’éclairage extérieur sont proposées à des maîtres d’ouvrage professionnels en direct par des sociétés qui se proclament spécialistes en éclairage et financent jusqu’à 100% du montant des produits qu’elles distribuent.

Ces offres, proposées la plupart du temps par internet ou par démarchage direct (y compris téléphonique), proposent gratuitement des luminaires importés pour quelques euros (hublots, réglettes, projecteurs…) qui doivent être installés à l’extérieur.

Si certaines de ces offres peuvent concerner l’éclairage public, placé sous la responsabilité des collectivités, la cible privilégiée de ces acteurs demeure néanmoins les installations d’éclairage extérieur privées (cour d’usine, parkings, parcs…).

Aujourd’hui, chaque luminaire installé correspond à une « prime » d’environ 80 €.L’attestation fournie par le maître d’ouvrage est négociée par le« fournisseur » auprès des obligés ou délégataires CEE.

Dans la majorité des cas, la réalisation des travaux est à la charge du maître d’ouvrage.

L’origine des offres de « luminaires gratuits »

Toutes les offres de « luminaires gratuits » reposent exclusivement sur le dispositif des CEE, et plus particulièrement sur les dispositions de la fiche RES-EC-104(version 2014 en annexe).

Cette fiche ne s’applique que pour la rénovation de l’éclairage extérieur existant permettant tout type de circulation, qu’elle soit publique (autoroutier, routier, urbain…) ou privée (voies, parkings, parcs…). À contrario, ces travaux ne peuvent concerner ni la mise en valeur des sites, ni l’éclairage des terrains de sport.

Conformément aux dispositions de la fiche RES-EC-104, ces travaux ne peuvent être réalisés que par des professionnels.

Les critères techniques à respecter

La rénovation de l’éclairage extérieur comprend la dépose des luminaires existants et l’installation de luminaires neufs dont la source lumineuse peut être remplacée.

Les critères d’éligibilité techniques sont les suivants :

- Ensemble optique fermé d’un degré de protection (IP) minimum de 65 ;
- Cas n°1 : efficacité lumineuse ≥ 90 lumen/W et ULOR ≤ 1% (ou, pour les luminaires à LED, ULR ≤ 3%) ;
- Cas n°2 : efficacité lumineuse ≥ 70 lumen/W et ULOR ≤ 10% (ou, pour les luminaires à LED, ULR ≤ 15%).La facture des travaux réalisés doit mentionner de manière explicite :

- La dépose des luminaires existants ;
- La mise en place de luminaires neufs ;
- Le nombre et les caractéristiques des luminaires neufs installés : degré de protection de l’ensemble optique fermé (IP), efficacité lumineuse (lumen/Watt) et ULOR (ou ULR pour les luminaires à LED).

Les contrôles réalisés

Par arrêté du 22 février2024, la DGEC (Ministère de la Transition Écologique) a décidé de mettre en place à partir du 1er mars 2024 des contrôles systématiques de ces travaux. Ces contrôles ont lieu de deux manières distinctes :

Contrôle par contact : réalisé par téléphone, courrier ou messagerie électronique, ce contrôle a pour objectif de vérifier :
- la mise en place de luminaires neufs installés ;
- l’absence de non-qualité manifeste détectée par le maître d’ouvrage sur les travaux effectués.

Si l’un au moins des points vérifiés lors du contrôle révèle un écart, le contrôle est jugé non satisfaisant.

Contrôle sur site : réalisé après l’achèvement des travaux, ce contrôle vérifie que :
- le maître d’ouvrage dispose bien des documents suivants : devis et facture des travaux ;
- la facture des travaux (ou le document issu du fabricant) comporte les mentions prévues par la fiche RES-EC-104 ;
- la facture des travaux (ou le document issu du fabricant) et l’attestation sur l’honneur ne présentent aucune incohérence (nombre et caractéristiques des luminaires neufs installés, degré de protection de l’ensemble optique fermé (IP), efficacité lumineuse en lumens par watt, et ULR ;
- les travaux concernent exclusivement l’éclairage extérieur ;
- les travaux ne concernent pas les illuminations de mise en valeur de sites ou l’éclairage de terrains de sport ;
- les luminaires existants ont bien été déposés ;
- les luminaires neufs ont bien été installés à la date de facturation des travaux (correspondant, le cas échéant, à l’attestation d’installation par les services techniques du bénéficiaire personne morale) et le nombre de luminaires neufs installés correspond à celui indiqué sur la facture ;
- la source lumineuse des luminaires installés peut être remplacée ;
- au vu de la facture ou, à défaut, du document issu du fabricant, il apparaît que les luminaires installés respectent les exigences de la fiche RES-EC-104 en termes de degré de protection (IP), d’efficacité lumineuse, d’ULOR et d’ULR.

Le maître d’ouvrage doit indiquer la localisation et le nombre de luminaires installés. En l’absence de cet inventaire, le contrôle est considéré comme non satisfaisant.

L’action de la CAPEB

La CAPEB s’est récemment rapprochée du Syndicat de l’Éclairage pour croiser les informations collectées et analyser les actions syndicales à envisager.

En effet, si la légalité de ces offres ne peut être remise en cause (dispositif réglementaire des CEE), plusieurs facteurs d’inquiétude ont attiré notre attention : montant des valorisations, absence de prescription par un professionnel, qualité des luminaires commercialisés du point de vue de leurs performances réelles et de leur durabilité, non intégration des travaux dans la proposition commerciale, etc.

Par ailleurs, ces luminaires doivent respecter des textes réglementaires européens (règlement 2019/2020relatif aux sources et aux auxiliaires) et leur installation est soumise aux exigences de l’arrêté relatif aux nuisances lumineuses, avec en particulier des limites de température de couleur (généralement 3000 kelvins). Ils doivent de plus être affiliés à un éco-organisme pour la collecte et le retraitement des déchets.

La DGEC a commencé à se préoccuper de l’impact de ces offres en imposant depuis le 1er mars2024 des contrôles systématiques avant dépôt des opérations concernées.

Dans le prolongement, une révision de la fiche RES-EC-104 est en cours d’instruction au niveau de l’ATEE(Association Technique Energie Environnement) afin de modérer les effets d’aubaine actuels et de mettre fin rapidement à certains abus de sociétés qui sont plus des négociants en CEE que des éclairagistes. Ces travaux permettront également de distinguer les travaux de modernisation de l’éclairage public de ceux qui concernent l’éclairage privé.