Catégories objectives : Comment conserver le bénéfice des exonérations de cotisations sociales ?
1. Le contexte général
Pour mémoire, un régime de protection sociale complémentaire d’entreprise (garanties Frais de santé, prévoyance, retraite supplémentaire) bénéficie d’un régime social et fiscal de faveur à plusieurs conditions, et notamment s’il est regardé comme « collectif » et « obligatoire ».
Le régime est considéré comme collectif (c. séc. soc. art. R. 242-1-1) :
- s’il couvre l’ensemble des salariés ;
- ou s’il couvre une ou plusieurs catégories de salariés, à condition, dans ce cas, que les critères retenus permettent de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées.
2. Quels sont ces critères ?
Lorsque le régime santé ou prévoyance ne couvre pas directement l’ensemble des salariés, l’employeur peut opter pour l’un des cinq critères suivants afin de définir une catégorie objective :
- Critère 1 : l’appartenance aux catégories de cadres et non-cadres,
- Critère 2 : les seuils de rémunération définis par référence aux tranches de rémunération AGIRC-ARRCO,
- Critère 3 : appartenance aux catégories et classifications professionnelles de conventions collectives,
- Critère 4 : appartenance aux sous-catégories de conventions collectives,
- Critère 5 : appartenance à une catégorie issue d’usages en vigueur dans la profession.
3. Que change le décret pour les catégories objectives ?
Le décret relatif aux catégories objectives publié au JO le 31 juillet 2021, est entré en vigueur le 1 er janvier 2022 modifie les critères 1 et 2 pour prendre en compte la fusion au 1er janvier 2019 des régimes AGIRC-ARRCO. Il instaure une période transitoire de trois ans pour les contrats déjà en place.
S’agissant du critère 1, la nouvelle réglementation du 30 juillet 2021 fait référence à l’ANI (Accord National Interprofessionnel) du 17 novembre 2017, qui fixe les conditions de la fusion AGIRC-ARRCO. Celui-ci fait désormais référence aux articles 2.1 et 2.2 de l’ANI pour déterminer
l’appartenance des salariés à la catégorie des cadres ou des non-cadres.
Quant au critère 2, les classes de rémunération sont maintenant établies en fonction du PASS (Plafond Annuel de la Sécurité Sociale) et peuvent donc correspondre à l’équivalent de 1, 2, 3, 4 ou 8 PASS.
Les 3 autres critères prévus pour les catégories objectives, ainsi que les régimes s’y référant pour la catégorisation des salariés, ne sont enfin pas
modifiés par le décret du 30 juillet 2021 et, par conséquent, non concernés par la réforme.
4. Quelles conséquences pour les entreprises ?
Après le 31 décembre 2024, il ne sera plus possible, dans les contrats d’assurance et les actes juridiques internes, de faire référence non seulement au personnel affilié ou à l’Agirc mais également aux articles 4, 4 bis et 36 de la CCN du 14 mars 1947.
Ces intitulés ne seront plus admis et devront être remplacés par les articles 2.1 et 2.2 de l’ANI du 17 novembre 2017. Concrètement, si l’employeur ne l’a pas déjà fait, il lui faut vérifier que la décision unilatérale, le projet d’accord proposé par le chef d’entreprise ratifié à la majorité des
intéressés (accord référendaire), ou l’accord collectif (ou convention collective) est bien en conformité avec la réglementation et éviter ainsi tout redressement URSSAF.
5. Quelles sont les démarches à effectuer en tant qu’employeur ?
Si les contrats de protection sociale s’appliquent à l’ensemble des salariés de l’entreprise, aucune modification ne sera à effectuer.
Si l’entreprise a fait le choix de distinguer les contrats de complémentaire santé ou de prévoyance selon les catégories objectives, elle devra mettre à jour l’acte de mise en place du régime qui comprend :
- La Décision Unilatérale de l’Employeur (DUE) : elle sera à rédiger pour chacune des catégories objectives et devra être remise aux salariés. La
DUE de mise en conformité devra être remise contre décharge à tous les salariés
- Les conventions ou accords collectifs : ils sont à rédiger conjointement entre l’employeur, et les représentants du personnel.
- Le référendum : pour lequel l’employeur doit consulter tous les salariés concernés et qui doit être validé par la majorité des votants.
Par ailleurs, indépendamment de la modification de l’acte fondateur du , régime dans l’entreprise, l’entreprise doit aussi s’assurer que le contrat
d’assurance le liant à l’organisme assureur (mutuelle, institution de prévoyance, entreprise d’assurance) est bien le reflet de l’acte fondateur et également conforme, quitte à le modifier également s'il y a lieu.
6. Le cas particulier des Etam « ex-article 36 »
Au-delà de la mise à jour des critères 1 et 2, le cadre législatif instauré par le nouveau décret ne fait pas cas des salariés concernés par l’article 36 de la Convention Collective Nationale AGIRC, soit les assimilés cadres. Lors de sa réforme, le législateur a ainsi laissé le soin aux partenaires sociaux de définir le caractère de leur statut lors de négociations au sein des différents accords de branche.
Concrètement, dans le Bâtiment : le maintien d’assimilés Cadres « ex article 36 » au-delà du 31 décembre 2024 implique la conclusion d’accords ou de conventions de branche avec agrément par la commission rattachée à l’APEC.
Suite à la publication du décret du 30 juillet 2021 et compte tenu de l’importance des effectifs concernés, les partenaires sociaux de la branche du Bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés ont souhaité que les ETAM anciens « articles 36 » puissent conserver le bénéfice du statut d’assimilé Cadre pour leur couverture collective de prévoyance et, le cas échéant, pour celle de santé, au-delà du 1er janvier 2025.
Ceci a conduit à une signature d’un avenant conclu en date du 4 juin 2024.
Cet avenant a fait l’objet d’une demande d’extension auprès du Ministère chargé du travail ainsi que d’une demande d’agrément auprès de la commission rattachée à l’APEC, pour une prise d’effet à partir du 1er janvier 2025.
L’absence de publication de l’arrêté dans les champs des plus de 10 salariés n’a pas permis d’ouvrir un texte à la signature pour les salariés relevant des ETAM anciens « articles 36 » pour ces entreprises.
Fin 2024, deux situations possibles concernant les salariés « ex article 36 » :
* si les entreprises du bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés relèvent d’un accord de branche agréé par l’APEC, il leur sera confirmé que les dispositifs de protection sociale et les paramétrages de paie de leurs assimilés Cadres « ex-articles 36 » pourront rester inchangés en 2025 ;
* à défaut d’accord, à compter du 1er janvier 2025,
- Les anciens « articles 36 » ne pourront plus bénéficier des avantages retraite et prévoyances des cadres. Il conviendra alors de les informer et ils relèveront de la protection sociale.
- des ETAM (en prévoyance),
- des Non-Cadres (en santé).
- Les anciens « articles 36 » continueront de bénéficier de la retraite et de la prévoyance des cadres mais les cotisations patronales finançant ces régimes ne pourront plus bénéficier des exonérations sociales.
Nous ne manquerons pas de vous tenir informés très prochainement des suites données à cette négociation.
DJS – AH le 15 octobre 2024