Abandon de poste : la démission sera bien présumée !
I. Abandon de poste : création d’une présomption de démission
On parle d’abandon de poste lorsqu’un salarié ne vient plus travailler sans justifier son absence.
Aujourd’hui dans une telle situation vous ne pouvez pas considérer que le salarié a démissionné, la démission ne se présumant pas.
Vous pouvez en revanche envisager une sanction disciplinaire allant jusqu’au licenciement pour faute grave. Après bien sûr avoir tenté de prendre contact avec le salarié et d’en savoir plus sur les raisons de son absence.
Rappel :
Les conventions collectives nationales des ouvriers dans le BTP imposent l’information « dans les plus brefs délais » de l’employeur en cas d’absence, et l’envoi, le cas échéant, d’un certificat médical dans les 48 heures.
Si vous optez pour le licenciement pour faute grave, le salarié n’a pas le droit à une indemnité de licenciement ni à une indemnité compensatrice de préavis mais peut prétendre au chômage contrairement au salarié démissionnaire (sauf démission légitime).
Le fait qu’un salarié qui procède à un abandon de poste ait accès à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un salarié qui démissionne a provoqué un débat sur l’abandon de poste. Et il a été décidé d’en modifier les règles dans le cadre du projet de loi sur le marché du travail.
Après de nombreux débats, le projet de loi sur le marché du travail crée finalement une présomption de démission. Elle s’applique lorsque le salarié abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail après que vous l’ayez mis en demeure.
Cette mise en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste doit se faire par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans un délai que vous fixez.
Un décret va venir déterminer un délai minimum à respecter. Le salarié sera présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai.
Le salarié pourra contester cette présomption en saisissant le conseil de prud’hommes (par exemple s’il a quitté son poste pour des raisons de santé ou sécurité). Le bureau de jugement statue dans un délai d’un mois.
Il n’est pas précisé les conséquences du renversement de cette présomption mais seulement que le conseil de prud’hommes se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. On peut imaginer que les juges considèrent, à l’image de la prise d’acte, qu’il y aurait alors licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ce qui fait peser un vrai risque pour l’employeur qui utilise cette présomption de démission…
Il est également intéressant de souligner qu’avec cette rédaction de la loi, il ne sera pas possible de considérer le salarié démissionnaire s’il reprend le travail après un abandon de poste dans les délais requis ; y compris s’il le fait à plusieurs reprises.
Mais rien n’interdit de recourir alors au licenciement pour faute grave.
Vous pouvez d’ailleurs dans tous les cas parfaitement préférer utiliser la procédure disciplinaire plutôt que la nouvelle présomption de démission créée…
II. Abandon de poste et démission présumée : quand s’appliquera la mesure ?
Cette mesure figure au projet de loi sur le marché du travail, projet sur lequel les sénateurs et députés viennent de trouver un accord en commission mixte paritaire. Un vote formel doit encore avoir lieu cette semaine au Parlement (le 17 novembre au Sénat) mais le texte ne sera plus modifié. En revanche, il faut s’attendre à une saisine du Conseil constitutionnel. Si ce dernier valide la mesure, elle pourra entrer en vigueur après la publication de la loi au Journal officiel.
Mais en pratique elle ne sera pas applicable tant que le décret d’application fixant le délai minimum pour reprendre le travail ne sera pas publié.
Ce décret pourrait également préciser une date d’entrée en vigueur autre.
A suivre !